LE PICCOLO
Le songe de Florence Lavaud
Comment conjuguer sur un même plateau l’énergie de la musique rock et la puissance évocatrice du théâtre ? C’est ce dilemme, éminemment complexe, que doit affronter Florence Lavaud (Chantier Théâtre) à quelques semaines de la création de Songe !Dans ce nouveau spectacle protéiforme, l’énergique metteuse en scène a souhaité réunir des trois musiciens rock (guitare, basse, batterie), un comédien (Jérémy Barbier d’Hiver) et deux poètes/slameurs (Marco Codjia et Souleymane Diamanka) dans une libre adaptation du Songe d’une nuit d’été de Shakespeare. Ou plutôt sa relecture à travers le regard de l’un de ses personnages, Puck. Sur scène, les quatre interprètes, un comédien et trois musiciens, deux hommes et deux femmes, «porteront ensemble les personnages: les amoureux, Puck, Obéron… Ils seront des voix, mais également des corps, car les mouvements, les déplacements dans l’espace scénique, et les silences, ont autant d’importance que les mots dans le théâtre très visuel qui est le mien», souligne Florence Lavaud. ❚ C. P
Magique et beau
La lumière baisse, d'autres images apparaissent. L'homme sur scène est directement confronté à son image, à ses images. Il est multiple, à la fois le même et quelqu'un d'autre. Il va, il vient, il est partout. C'est magique, presque angoissant, mais beau. Quatre mouvements du fameux concerto « Petite musique de nuit » de Mozart, une œuvre pleine de mystère, accompagnent désormais les images tandis que l'un des comédiens se livre à des acrobaties sur son vélo immobile. D'autres images apparaissent sur l'écran, abstraites ou non, installant des climats et jusqu'au dernier mouvement (fameux) du « Quatuor Américain » de Dvorak sur lequel s'achève la pièce. On rêve, on frissonne, on part loin.


Auteure et metteure en scène, Florence Lavaud est Directrice artistique du Lieu et de la Compagnie, conventionnée par le Ministère de la Culture et de la Communication (DRAC Nouvelle Aquitaine) et subventionnée par le Conseil régional Nouvelle-Aquitaine et le Conseil départemental de la Dordogne.
Elle développe, dès ses premiers spectacles, une écriture dramaturgique sans paroles, où le geste, l’image, le son et la musique se répondent.
Lorsqu’on l’interroge sur son processus de création, elle répond travailler comme un peintre. Ses palettes sont multiples et s’enrichissent sans cesse de nouveaux outils, moteurs d’imaginaire et d’écriture dramaturgique.
Parallèlement à l’écriture d’un théâtre visuel, elle s’associe fréquemment à des auteurs français ou étrangers (Jean-Louis Bauer, Nancy Huston, Karin Serres, Dominique Paquet, Elsa Solal...) pour ouvrir son théâtre à des formes, des mots et des regards multiples.
En 2006, elle reçoit le Molière du spectacle jeune public pour Un petit chaperon rouge.
À ce jour, les 20 créations de Florence Lavaud comptent plus de 2500 représentations en France et dans 19 pays : Norvège, Dubaï, Koweit, Egypte, Brésil, Luxembourg, Suisse, Hollande, Oman, Espagne, Italie, Ukraine...


J’écris mes spectacles comme on projette des songes. Ces songes peuvent être fantastiques, doux, brutaux, dérangeants, mais doivent nécessairement bousculer ou interroger la perception : rêve-réalité, visible-invisible.
Pour écrire, j’ai besoin du plateau : mon travail implique une écriture simultanée et un montage millimétré du mouvement du comédien, de l’image et du son. Naissent alors des tableaux en clairs-obscurs, des toiles de vie…
Je mets invariablement en scène l’être dans sa dualité, dans son indéfectible quête à vivre, à grandir… à tenir ses rêves que la réalité bouscule. (F.L)